Mise à jour le 17/04/2018, par Damien - Com’ ANDAR

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Web : vos données de santé

VOS DONNÉES DE SANTÉ SUR INTERNET
PARTIE 1 : MYTHE OU RÉALITÉ ?

Hervé SERVY , ingénieur et expert e-santé.
Fondateur de sanoia.com, partenaire de l’ANDAR.

Depuis à peine plus d’un an, pas une semaine sans qu’un article dans un journal, un reportage à la télévision [1] ou la radio nous parle des “données de santé sur internet” ou de la e-santé. C’est un signe encourageant, car oui incontestablement il y a un potentiel réel à utiliser les innovations technologiques pour améliorer notre santé. Mais ces « données », que peut-on en faire in-fine ? D’où viennent-elles au fait ? Et le Dossier Médical Partagé (ou Personnel), sorte de Carnet de Santé des pouvoirs publics, où en est-il ?

1ÈRE PARTIE : LE DOSSIER MÉDICAL PARTAGÉ (DMP) UN RETARDATAIRE QUI A AIDÉ À INVENTER LE FUTUR

On ne peut parler de données de santé sans revenir sur ce projet emblématique de la « santé connectée » lancé en France en 2003 et qui a, selon certaines sources, coûté 500 Millions d’Euro. Un avion Concorde de la santé connectée diraient les mauvaises langues… Nous vous présentons le DMP, acronyme de Dossier Médical Personnel et depuis quelques mois Dossier Médical Partagé.

1° Le DMP : retour sur un beau projet… et raison de son échec

Le principe était, sur le papier, intéressant : mettre en commun toutes les données de tous les praticiens qui vous suivent, pour faciliter votre prise en charge. 13 ans après son lancement (en 2003), il n’est toujours pas utilisable. Plusieurs obstacles. D’abord celui de son utilisabilité dans la « vraie vie ». Dans un système de santé où la consultation généraliste est toujours à 23 Euro, comment le médecin aurait le temps de consulter l’ensemble des données de votre vie médicale avant de vous soigner ? Certes, les professionnels ont du mal à communiquer. Nous le vivons tous en tant que patients. Mais cette difficulté de communication n’est pas due à l’absence d’outil. La vraie raison est leur manque de formation à agir en équipe, et la difficulté à concevoir une prise en charge holistique (ou globale). Les réseaux de soins essaient de dépasser ces « silos » mais ils demandent beaucoup d’énergie et ne sont pas tous couronnés de succès. Installer un outil de « mise en commun » et demander à des personnes éduquées à agir par spécialité ou par organe, de passer du temps à mettre des données dedans, pour les autres justement, ne produira rien. L’informatique ne peut qu’accélérer, fluidifier les bonnes habitudes, mais jamais, jamais, jamais, elle n’a créé « Deus ex machina [2] » de bonnes habitudes.

2° Le DMP : pour 2017, place au réalisme !

Depuis quelques mois (et l’article 25 de la Loi de Santé) [3] il est sérieusement envisagé que le DMP ne soit pas qu’un dossier rempli par les professionnels de santé mais une sorte de fenêtre ouverte sur des données qui existent déjà : les données de l’assurance maladie. En effet, quelque part dans un sous-sol, dans des ordinateurs d’une capacité gigantesque réside un trésor : tous les actes médicaux et médicaments qui vous ont été remboursés depuis votre naissance. C’est la base de données de l’assurance maladie. Même si elle ne contient pas le niveau de détail idéal, savoir que vous avez été remboursé d’un pneumologue, tous les 6 mois depuis 10 ans, signifie très probablement que vous avez un problème pulmonaire. De même si vous consommez du Lopressor depuis 2 ans, vous avez probablement une hypertension… L’aspect brillant de cette idée est d’utiliser ce qui existe déjà et d’agir avec réalisme : plutôt que demander un effort pour créer une nouvelle donnée « parfaite », il vaut mieux déjà accéder facilement à une donnée qui existe déjà quitte à la compléter ; Pragmatique. Moderne.

3° Le DMP : une maïeutique pour start-up ?

J’aimerais revenir sur un avantage et un inconvénient du projet DMP.

L’inconvénient, qui est maintenant derrière nous, est que ce projet a mobilisé énormément d’énergie et a semblé si fondamental, que son interminable lancement/re-lancement/recadrage/défibrillation [4] a empêché tous les autres projets pendant 10 ans. Rien ne pouvait -et de devait- s’inventer car, sans DMP comme « socle », rien n’était possible. CQFD. Les projets qui étaient envisageables, autorisés devrais-je dire, étaient ceux s’appuyant sur le DMP. Mais…. Il n’existait pas ! Ces projets demeuraient donc « théoriques » … mais financés, je vous rassure, par des subventions bien réelles… De plus, les projets des pouvoirs publics, étant liés à une dimension politique, ne pouvaient supporter une concurrence privée, à l’époque. En effet on était encore loin du mouvement « open data » (ou « donnée numérique ouverte ») et la santé était trop sérieuse pour être gérée par des « privés ». Que de PME furent asphyxiées juste car elles proposaient une vision un peu différente. En résumé, en 2003, la France avait la vision pour être en avance mais a voulu faire une sorte de « plan informatique de santé ». Erreur et échec.

Mais ce temps est révolu. En 2016, la France comble son retard avec énergie, grâce à un écosystème de « starts up » qui enfin innovent librement. En 2016, on compte plus de 100 sociétés en France dans le domaine de la e-santé. Serait-ce une preuve que même les pouvoirs publics ont compris ? Il y a quelques mois, la CNAM, aidée du département EtaLab [5] , organisait un concours [6] pour start-up afin de valoriser les données issues de ses bases de données. Totalement impensable il y a encore 2 ans…

L’avantage c’est qu’il a permis à beaucoup d’ingénieurs de réaliser que les systèmes d’informations de santé (ndlr : impliquant des médecins…) sont complexes à concevoir, même avec des budgets colossaux. Savez-vous qu’en 2016, certains CHU n’ont toujours aucun outil pour partager les dossiers patients entre les services (nous considérons pour les besoins de cet article, qu’une enveloppe en papier, porté à bras d’internes n’est pas un système automatisé…). Est-ce un mal Français ? Non. Il y a plus de 3 ans, Google le géant de l’internet, a abandonné son projet qui visait à fusionner automatiquement les données venant d’hôpitaux américains. En effet, les données étaient si mal décrites, si différentes entre chaque hôpital, qu’elles en devenaient finalement inutilisables. Même pour Google, c’est dire …

Et donc, me direz-vous ? Au vu de tout cela, la nécessité d’un changement de cap radical et profond a semblé une évidence. Plutôt que dépenser de l’énergie du côté de l’informatique de santé classique (celle des « médecins »), les industriels de l’informatique ont décidé de s’intéresser directement aux patients. C’est ainsi que sont apparus les services aux patients sur internet, les applications mobiles pour la santé, les objets connectés et enfin les services de « Big Data [7] », et que sont arrivés dans le jeu, Apple, Google, Microsoft, IBM. Ils partagent tous la même idée : « et si on fournissait des outils pour permettre aux patients de mieux gérer leur santé et d’agir à leur niveau ? ». Cela s’inscrit parfaitement dans la logique du « patient actif », du patient acteur de sa santé. C’est un succès et ça ne fait que commencer…

Nous vous invitons à découvrir ces innovations et ces services dans la 2nd partie de cet article à sortir prochainement. Ce sera l’occasion de vous présenter le service Sanoia dédié à la polyarthrite et développé avec l’ANDAR et la Société Française de Rhumatologie [8] !


[2Personnage ou événement inattendu venant opportunément dénouer une situation dramatique

[5Service du premier ministre français chargé depuis 2011 de créer un portail unique interministériel de données publiques. www.etalab.gouv.fr

[7« grosses données » ou « méga données ». Ensemble de données qui deviennent tellement volumineux qu’ils sont difficiles à travailler avec des outils classiques de gestion de bases de données ou de gestion de l’information. (source : Wikipedia)

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